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Geneviève Artru ou l’accent coloré

    Quoique artiste depuis toujours, la couleur ne s’est imposée à Geneviève que par petites touches. Initialement conquise par le pouvoir dramatique et séduisant du noir et blanc, passionnément imprégnée d’une culture cinématographique, Geneviève s’exprime d’abord essentiellement au fusain.

    Un voyage en Toscane lui révèle alors la couleur: elle la découvre et la comprend via la lumière des peintures de la Renaissance. « L’art ne reproduit pas le visible, mais rend visible » écrit Paul Klee.

    Tel un accent, la couleur s’invite alors progressivement dans ses tableaux… et ne la quitte plus!

    Les arts du spectacle comme point de départ

    La passion pour le théâtre et l’intérêt pour les jeux de lumières au cinéma l’amènent vers des études en scénographie, une spécialisation qu’elle entreprend à l’EnsAD après sa formation à l’école des beaux arts de Paris. Elle crée alors des décors.

    La couleur au service de l’intention

    Dans son métier orienté aujourd’hui vers le numérique, Geneviève met la couleur au service de l’intention de son commanditaire. Elle aime l’exploiter dans des accents vifs et discrets à la fois, toujours à l’appui du message à transmettre, en support à la fonction du produit final.

    On ne dit pas la même chose avec du bleu ou du rouge, et on oublie parfois la connotation de certaines couleurs dans des contextes donnés. Par exemple le vert est utilisé dans le domaine de l’édition pour réaliser des corrections, si bien qu’inconsciemment, dans ce milieu, cet usage peut en modifier la lecture.

    Sur la carte de visite qu’elle vient de réaliser, Geneviève me montre comment l’accent rouge magenta, décliné discrètement sur l’espace de la carte permet une lecture fluide et efficace des différents champs présents. Son effet tonique est indéniable.

    Harmonies de couleurs

    Décliner des harmonies? Oui, mais, le choix de l’association n’est pas une affaire de bon ou de mauvais goût, c’est une affaire d’équilibre entre les masses colorées, leur matière et leur aspect (mat, brillant, etc.).
    Pour la décoration d’un lieu, la conception d’une scène, il est important d’avoir un point de départ, sinon on s’égare.

    La créativité via la contrainte

    Geneviève aime la contrainte qu’elle voit comme un jeu, un défi à relever. L’entonnoir est la meilleure image de son processus créatif : au début on s’y sent à l’étroit, puis on est obligé de développer des solutions imaginatives et on se rend compte qu’un champ immense s’ouvre à nous.

    Des amis lui ont confié la décoration de leur maison précisant que l’ensemble devait s’accorder avec un meuble de cuisine vert olive. Un vrai challenge: Geneviève n’aurait jamais choisi cette couleur de prime abord. Pourtant elle a adoré cette commande qui l’a amenée vers des associations audacieuses. Déjà elle pense à introduire un accent magenta dans la séparation de la cuisine avec le séjour; on le retrouve ensuite ici sous forme d’un coussin, là, sur la terrasse, sous la forme d’une orchidée.

    Les rayures pour le rythme

    Geneviève reste cependant fidèle au noir et blanc qu’elle décline en larges rayures, traces de son goût pour l’univers du cirque qui l’a largement inspirée. Selon Geneviève, cette forme graphique dynamise un ensemble coloré, elle ajoute un rythme et agit comme une complémentaire, en l’équilibrant par sa neutralité.

    Elle et ses amis conviennent de l’exploiter également dans l’escalier, assurant une belle transition vers l’étage où de nouvelles gammes de couleurs sont développées: des variations de bleu dans une chambre au nord, des violets et parme dans le couloir, de l’orange associé au rose dans une chambre, à un bleu soutenu dans une autre. Partout le blanc légèrement cassé assure l’équilibre, parfois seul, s’il doit ajouter de la clarté, parfois associé au noir si une touche graphique est souhaitée.

    Des tableaux vivants

    Chez ses amis comme chez elle, les tableaux de Geneviève semblent faire partie de la maison, ils y vivent comme les habitants des lieux. Dans le séjour, un tableau est en conversation avec le piano et se voit fragmenté dans le mur d’en face, dans une collection de miroirs circulaires, fragments toujours différents selon le point de vue du visiteur.

    Chez elle, une échelle placée devant un tableau ne heurte personne, c’est un ami, avec lui on ne fait pas de manières, il dégage énergie et beauté malgré tous les obstacles.

    Cactus et combats avec l’ange

    Les tableaux de plus petite taille (120cmx120cm) ont cependant droit à plus d’égards: la série des combats avec l’ange, inspirés d’un épisode de la Bible qui symbolise pour elle le combat avec soi-même, dispose d’un espace propre. On sent une prédilection pour un bleu profond, du lapis lazuli, un pigment naturel très cher, particulièrement apprécié au Quattrocento (Renaissance italienne, XVème sciècle), pigment qu’elle associe à l’or dans cette série. Par l’intérêt qu’elle porte à ce sujet, Geneviève inscrit son travail dans le cours de l’histoire de l’art, donnant sa propre interprétation après celles de Rembrandt (1659), Doré (1855), Delacroix (1861), et Gauguin (1888).

    Présent dans plusieurs tableaux, le cactus intrigue. Ses formes arrondies rappellent la figure humaine. Le cactus se nourrit de très peu et donne beaucoup, que ce soit sous forme de fleur, de fruit ou de suc; il n’hésite pas cependant à se défendre des prédateurs. A travers cette représentation, Geneviève parle d’une symbolique qui lui est chère.

    La création personnelle et la commande

    Tout au long de sa carrière Geneviève n’a cessé de créer, que ce soit par le dessin, la peinture ou l’écriture. Bien sûr elle a vendu ses créations, mais il fallait assurer un revenu sûr et régulier pour élever sa fille: la réalisation de décors, la mise en scène, l’enseignement, le graphisme… tous ces métiers l’ont nourrie dans tous les sens du terme.

    Le travail de commande ne la gêne pas, au contraire, il lui fait prendre des chemins qu’elle ne connaît pas. Là, le client est roi: il ne choisit pas la version qu’elle préfère? Cela n’a aucune importance, car sa liberté reste dans sa création personnelle.

    Beaucoup de tableaux de Geneviève ont leur place dans des collections privées au Luxembourg, en France (Vincennes, Paris, Meudon…) et même au siège de l’European Aeronautic Defence and Space company.

    Le site de Geneviève : http://genevieveartru.com/


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    2 commentaires sur “Geneviève Artru ou l’accent coloré”

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